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3 novembre 2004
15 décembre voir la flexibilité à la
française
Il ne s'agit pas pour GPE de prendre position sur tel et tel modèle et façon
d'envisager l'avenir. Par contre rien de nous empêche de nous renseigner et, de
nous informer de façon à faire avancer les idées. Tous ces extraits sont
pris dans la presse.
Suède, Norvège, Danemark et Finlande ont été confrontés (comme
nous) à des dérives budgétaires graves. Un état doit gérer son budget comme un
ménage et équilibrer les dépenses et les recettes. En France,
nous en sommes à mille milliard d'euros de déficit, la cote d'alerte est
largement dépassée. Gouverner c'est prévoir ... Et c'est intéressant de voir
comment ces pays ont fait.
Extrait de
l'Express du 25/10/04
'Express du
25/10/2004
Le nouveau modèle scandinave
par Julie
Joly
Hier, ils étaient dans les cordes, englués dans un système
public sclérosé. Aujourd'hui, Norvège, Danemark, Suède et Finlande sont en tête
des pays les plus agréables à vivre, tout en affichant une santé économique
insolente. Conjuguer compétitivité et haut niveau de protection sociale: la
formule magique fait des envieux
Il y a moins d'un siècle, la Norvège vivait encore au
rythme des saisons, peuplée de paysans, d'églises luthériennes et de fjords
gelés... Qui aurait pu penser que ce pays de glaces serait un jour l'un des
plus modernes au monde? Il faut imaginer la Suède et le Danemark aussi, dans
les années 1970, paralysés par les grèves et l'impotence d'un Etat sclérosé.
Ou encore la Finlande, libérée du joug russe en 1917 mais plongée, au début
des années 1990, dans l'une des crises économiques les plus graves qu'un pays
occidental ait connues. Aujourd'hui, le pays est classé en tête des pays les
plus compétitifs par les chefs d'entreprise du Forum économique mondial (les
mêmes réunis chaque année à Davos): des délégations d'hommes politiques venues
du monde entier, Français en tête, traversent la Baltique pour admirer la
vigueur de sa remontée. Tous n'ont plus qu'un mot à la bouche: s'inspirer du
«modèle scandinave»... Mais de quoi parle-t-on au juste?

La rudesse du climat, un goût prononcé pour les têtes
couronnées, les alcools forts et le télémark (cette pratique de haute
voltige inspirée des premiers skieurs norvégiens) ne sont certes pas les
seuls points communs de ces quatre pays nordiques. Le poids de leur État
providence, du consensus social et la toute-puissance de leurs syndicats
comptent aussi parmi leurs «exceptions culturelles», de celles qui
inquiètent les économistes. On pourrait y ajouter les bugs de leur système
de santé, aux listes d'attente interminables et aux tarifs exorbitants, ou
encore le niveau record de leurs impôts... Pourtant, le meilleur est à
venir. Au dernier palmarès du «Bonheur mondial», étude plus que sérieuse
menée par l'institut français Globeco, la Suède, la Norvège, la Finlande et
le Danemark caracolaient en tête des pays les plus sûrs, les mieux formés,
les moins corrompus, les plus égalitaires et les plus agréables à vivre.
Mieux: leur santé économique est insolente.
Alors que la France et l'Allemagne luttent pour assouplir les critères de
Maastricht, le quartette scandinave affiche des
comptes publics en excédent, un taux de chômage inférieur à la moyenne
européenne et les plus forts taux de croissance des pays de l'OCDE.
L'effondrement des années 1980
«C'est amusant de penser qu'il
n'y a pas si longtemps la Suède et la France étaient deux pays à peu près
comparables», lance le journaliste indépendant Magnus Falkehed
entre deux bouchées de gâteau Ladurée. L'auteur du Modèle suédois, paru
l'année dernière (Payot), ne le sait que trop: les
réformes menées depuis dix ans dans les pays scandinaves, le sien en tête,
ont largement changé la donne. Non seulement ces contrées n'ont pas
renoncé aux principes qui ont fait leur réputation - ce subtil cocktail de
libéralisme maîtrisé et d'Etat providence cité pour la première fois à
Yale, en 1936, par un universitaire américain, Marquis Child, et
plébiscité par l'ensemble des scandinaves... Mais la
crise violente du début des années 1990 leur a légué un nouveau, et
redoutable, leitmotiv: l'efficacité publique.
Longtemps sous-développés - leur révolution
industrielle ne date que du début du XXe siècle - les pays scandinaves ont
impressionné le monde entier par la rapidité de leur
rattrapage économique et la générosité de leur système social. Dans
les années 1980, la dérégulation effrénée des marchés bancaires et les
chocs pétroliers leur seront fatals: après plusieurs décennies de
croissance ininterrompues, la Suède voit son produit intérieur brut
reculer trois années de suite. En l'espace de deux
ans, le nombre de ses citoyens au chômage quadruple, les faillites se
multiplient et les taux d'intérêt atteignent des sommets. Même scénario au
Danemark, pays dont les déficits publics menacent un temps de faire
imploser le système. En Finlande, sous la violence de la crise, l'économie
touche le fond en moins d'un an: entre 1990 et 1991, son PIB chute de plus
de 7%. Il perdra 12% avant 1995.
La machine publique allégée
Dans cette période tumultueuse, seule la Norvège
échappera à la récession, et pour cause... Les gisements de pétrole et
de gaz naturel découverts à la fin des années 1960 l'ont mise à l'abri
du besoin pour un moment. Mais pour les autres pays scandinaves, une
dure réalité s'impose: entre l'Etat et la providence, il faut choisir.
«Il n'a jamais été question de renoncer à notre modèle social, précise
aussitôt l'économiste Joakim Palme, directeur de l'Institut d'études
prospectives de Stockholm et conseiller du dernier gouvernement suédois.
Les réformes ont été pensées dans un seul but: sauver l'essentiel.»
C'est ce que l'on appelle le pragmatisme scandinave. Certains y verront
l'héritage des enseignements luthériens, d'autres les traces, plus
lointaines, d'une tradition viking... On ne survit pas dans le Grand
Nord sans un certain sens de l'adaptation. Une chose est sûre: devant
l'adversité, ces Etats ont en commun la volonté d'agir, et d'abord sur
eux-mêmes. Et ce quelle que soit leur tendance politique.
Première étape de
leur plan d'action: alléger la machine publique. A l'époque,
l'entreprise n'est pas mince... Dès la fin des années 1980, les
gouvernements sociaux-démocrates scandinaves tailleront à grands coups
dans les effectifs. En dix ans, le nombre de
fonctionnaires d'Etat suédois chute de plus de 45%. En Finlande,
la baisse est de 35% sur la même période. Mais ce n'est pas tout. Déjà
bien amorcée en Finlande, au Danemark et en Norvège,
la décentralisation s'accélère dans ces trois pays.
Traditionnellement hypercentralisée, la Suède suit le mouvement: comme
ses voisins, elle confie aux régions et aux communes ses dépenses de
santé, de culture, de police et d'éducation, mais aussi la collecte et
le bénéfice de près d'un tiers de l'impôt sur le revenu. Le transfert de
compétences est «acté».
Suivra la division
des tâches. Par souci d'efficacité, toujours, les Etats
scandinaves - dont trois (la Norvège, la Finlande et le Danemark) sont
maintenant dirigés par des gouvernements conservateurs! - décident de se
concentrer sur le cœur de leur mission. Toute la partie «opérationnelle»
- comptabilité publique, gestion du personnel, des achats, etc. - est
confiée à des structures ad hoc: c'est la naissance des agences,
organismes publics de droit privé, véritables entreprises au service des
administrés. Elles concentrent aujourd'hui l'essentiel des effectifs
publics. Mais, surtout, leur souplesse est totale:
contrats temporaires, primes de résultats, salaires individuels,
évaluations permanentes, leurs employés ont toutes les caractéristiques
des salariés du privé.
Ce n'est qu'un début. Non contents d'avoir assoupli
le fonctionnement de leur Etat, les élus scandinaves s'attaquent très
tôt à son patrimoine. Après le dégraissage, le
nettoyage. Pour cela, nul besoin d'attendre le feu vert et moins
encore les injonctions de la Communauté européenne: dans ces pays,
la déréglementation des marchés publics fut
décidée dès le début des années 1990. Pour le téléphone, les
succès du finlandais Nokia et du suédois Ericsson parlent d'eux-mêmes:
la dérégulation a clairement servi les consommateurs. Même constat pour
les services postaux, confiés désormais en partie à des entreprises
privées. Adieu, les attentes infinies aux heures de fermeture des
guichets. En Suède, les colis sont accessibles vingt-quatre heures sur
vingt-quatre, sept jours sur sept, fériés inclus. Et pour cause: les
paquets sont livrés dans les stations-service, les commerces et les
galeries marchandes. Les entreprises, elles, profitent de la baisse
généralisée des tarifs. Une aubaine.
Consensus sur la réforme des retraites
Dans les transports, la
privatisation est partielle. Les Etats scandinaves coordonnent
toujours la gestion des réseaux ferrés, routiers ou encore maritimes,
mais sous-traitent, en partie, leur exploitation à des partenaires
privés. C'est ainsi que des gares, des trains, des lignes de métro,
des ferrys ou encore des lignes ferroviaires sont aujourd'hui
entièrement gérés par des entreprises de services. Parmi elles, les
groupes français Connex, filiale de Veolia Environnement, et Keolis.
Mais aussi Ikea, propriétaire, depuis 2002, de sa propre société de
fret en Suède. Certaines administrations vont même très loin, raconte
le journaliste Magnus Falkehed: c'est ainsi qu'à
Stockholm l'équivalent de notre RATP a décidé de mettre ses propres
filiales en concurrence avec le privé... «pour gagner en efficacité».
On aura tout vu.
Dernier volet de
ces réformes modèles, et non des moindres: l'optimisation des
politiques sociales. En Finlande et en Suède, la
réforme des retraites devient une priorité nationale dès le milieu des
années 1990. Dans ces deux pays, la solution diffère mais
aboutira, dans le consensus quasi général, à une privatisation
partielle du régime - désormais, une partie des cotisations est
investie sur les marchés boursiers. A la même
période, les dépenses de santé dérapent. Les élus scandinaves,
conscients de toucher là l'épine dorsale de leur fameux modèle social,
annoncent pourtant très vite la couleur: les
patients devront payer de leur poche une part de la facture
pharmaceutique, hospitalière et médicale, soit de 150 à 300 € par an
selon les pays. La mesure ne permettra certes pas de palier le
sous-effectif chronique de personnel médical - il faut toujours
compter entre deux et six mois d'attente avant de décrocher un
rendez-vous avec un spécialiste. Elle aura en tout cas permis une
chose: éviter la faillite du système!
«Les Nordiques n'auraient pas idée de bloquer une réforme jugée
indispensable, observe Jean-Jacques Subrenat, ambassadeur de France en
Finlande. Les gens n'attendent pas tout de leur
Etat, ils sont même prêts à lui donner beaucoup tant que leur argent
est bien utilisé...» Il faut remarquer que ledit Etat le leur
rend bien. Dès les années 1980, les
fonctionnaires sont, eux aussi, priés de s'adapter: salaires au
mérite, entretiens d'évaluation, formation continue renforcée,
contrats temporaires. En quelques années, la fonction publique
scandinave, réputée pourtant pour être l'une des plus sclérosées au
monde, se calque sur le modèle du privé. Dans les administrations, la
priorité est donnée au «client»: toutes les informations utiles
doivent être disponibles sur Internet; le temps d'attente au téléphone
est limité au minimum. La qualité des services publics est évaluée
chaque année, mais aussi celle de ses agents.
Toute entorse au principe de qualité peut être sanctionné... par un
licenciement.
On le sait, le monde
merveilleux du «libéralisme social-démocrate» a aussi ses effets
secondaires. La déréglementation du marché de l'énergie n'est
pas sans bug: non seulement les baisses de prix escomptées ne se sont
pas manifestées, mais aussi la multiplication
des opérateurs complique sérieusement le choix et la vie des usagers.
Sans compter les craintes de dysfonctionnements liées à la complexité
du système. Dans des pays où la chaleur et la lumière sont deux
denrées vitales plus de six mois sur douze, l'enjeu est crucial...
De même, l'ouverture des transports publics au
privé inquiète les usagers: qui prendra en charge les frais
d'entretien des voies et des routes les moins rentables? Qui paiera
les investissements nécessaires à la modernisation des réseaux? Le
risque de voir les banques se saisir du problème le temps venu fait
redouter le pire... «Mais la force de notre modèle est de savoir
évoluer en permanence», assure l'économiste suédois Joakim Palme. Au
ministère de la Réforme de l'Etat, à Paris, le secrétaire d'Etat Eric
Woerth opine, visiblement envieux. En un siècle de croissance et de
crises, les froids pays du Nord ont su prouver leur solidité. Mieux:
ils sont les seuls à faire rimer compétitivité économique et
protection sociale. Leur
modèle peut-il s'exporter en France? En l'espace de trois ans,
pas moins de neuf ministres ont scruté l'expérience scandinave. Parmi
eux Jean-Pierre Raffarin, Claudie Haigneré (Recherche), Michèle
Alliot-Marie (Défense), Nicole Ameline (Parité et Egalité
professionnelle) ou encore François Fillon (Education). Et le rythme
des visites s'accélère. Le 11 novembre prochain, Eric Woerth sera en
Suède pour s'inspirer des dernières innovations de son administration
électronique. Un mois plus tôt, Gérard Larcher, ministre délégué aux
Relations du Travail, partait pour Copenhague en émissaire pour le
ministère de l'Emploi. Leur objectif: observer le suivi des chômeurs
danois. La suite dira ce qu'ils ont retenu du voyage.
15 décembre : la flexibilité à la
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